Présenter Rick WAKEMAN aux amateurs de rock progressif pourrait sembler futile, et si vous ne le connaissez pas, fort à parier que vous êtes tombé sur ProfilProg par erreur. Bon, si vous êtes novice dans le monde du Prog, et que cela vous intéresse, il fut claviériste de YES, et sa longue carrière solo de plus de cent albums est jalonnée de monuments progressifs conceptuels et symphoniques, de trames sonores de films en passant par des albums de méditations acoustiques. Dans ce qui fut publié par celui-ci dans les cinq dernières années, je vous recommande "The Red Planet", "A Gallery of the Imagination" et "Yessonata", avec des styles complètement différents dans chacun d'entre eux.

Mais ce virtuose britannique excelle aussi dans la musique "tranquille" contemporaine. Après "Piano Portraits" de 2017, et "Piano Odyssey" de 2018, qui furent salués par la critique, WAKEMAN, cette légende vivante des claviers, complète sa trilogie avec "Melancholia", dont la pochette au ton tristounet annonce la couleur de l'humeur. Soyons immédiatement très clair, cet album n'a rien à voir avec le rock progressif, car il s'agit ici de douze pièces jouées en solo, sur un grand piano Steinway modèle D, considéré comme l'un des meilleurs au monde. Un homme seul face à cette bête, au son direct, qui perce l'espace sonore de ses clapotis cristallins pour un récital très émotionnel.

L'album contient douze compositions ramassées, de trois à cinq minutes, au caractère très intime et introspectif, qui forme un superbe ensemble d'une grande cohésion, penchant évidemment vers des ambiances mélancholiques, nostalgiques, issues d'une période de sa vie où son piano a servi d'antidote pour combattre des moments de tristesse ou de troubles intérieurs. Chaque première écoute de pièce fut un plaisir, amadouant instantanément l'auditeur, et elles se présentent comme des mini trames sonores de scènes dramatiques. On notera la classe, l'élégance et la légèreté de "Sitting at the Window", la grande tristesse d'"Alone", le cinématisme de "Pathos" qui semble raconter un évènement tragique, où l'intensité grimpe jusqu'aux fines aigues. "The Morning Light" dénote dans ce lot avec une certaine luminosité hors thème, très agréable, dotée d'une aura ancienne qui siérait bien à vieux film en noir et blanc. Un moment plaisant pour se requinquer car trop de déprime aurait été rédhibitoire. Quant à la pièce la plus longue, "All in the Mind", elle appelle au voyage avec sa boucle sans fin captivante. Très appréciable aussi, "Melancholia" avec sa belle finale lointaine, qui s'éteint comme si c'était une boite à musique qu'on éloigne.

Les amateurs de piano classique et contemporain devraient adorer. On est soufflé par l'originalité, la qualité sonore, un ensemble d'une grande cohésion sans redondance, qui plaira à toute les membres de la famille, sauf à ceux qui ne jurent obstinément que par ce qui brasse de l'air. De la belle musique pure méditer, réfléchir, pour agrémenter l'ambiance d'une soirée cocooning, même un bon arrière-plan pour du travail de bureau à la maison, espérant ne pas choquer l'artiste qui demanderait surement plus d'attention pour son œuvre. Une bien belle chose! Titres préférés: "The Morning Light" et "All in the Mind". Bonne écoute!