Suivant l'accueil qu'il va recevoir de la part du microcosme progressif ce quatrième album de NUMEN "The Outsider" pourrait faire date car il s'agit ni plus ni moins d'un opéra rock de plus de cent minutes réparties sur deux CDs comportant seize titres (huit et huit).

Dans le disque précédent "Cyclothimia" de 2019 que j'avais chroniqué pour profilprog.com, NUMEN œuvrait dans un néo progressif à tendance symphonique hérité des grands anciens des années septante. Ce nouvel album nous renvoie quelque peu à leurs débuts "Samsara" si ce n'est qu'en supplément d'un quintet rock classique, nous retrouvons ici des cordes, des instruments à vents et même des cuivres.

Et nous allons en reparler, le changement de vocaliste de César ALCARAZ à Alba HERNANDEZ, donc du masculin au féminin apporte un énorme plus à la musique du groupe d'ALICANTE. Comme tout disque conceptuel, double de surcroit, la simple étude musicale ne suffit pas, il faut écouter à de nombreuses reprises pour décortiquer cet "Outsider".

"Overture" la pièce instrumentale lance les hostilités, très agréable, à mi-chemin entre symphonisme et néo progressif comme c'était prévu, les claviers gouleyants mènent la danse (9/10), mais pas pour longtemps. Nous passons au plus étendu "Any Day On Urantia" avec les premières vocalises d'Alba FERNANDEZ posées sur une belle ligne de basse de Victor ARQUES, un morceau qui éloigne NUMEN du néo progressif que nous lui connaissions pour une musique plus aventureuse, moins facile d'accès aussi, comme si RENAISSANCE revenait cinquante ans plus tard, beaucoup de synthétiseurs en nappes sonores (Manuel MAS le leader musical de la formation hispanique) et la guitare du nouveau venu Jorge CAMARERO dans la partie finale (9/10) qui va au fur et à mesure prendre le leadership sur les claviers.

Nous passons à "Tears Don't Fall" premier titre où apparaissent des cordes jouées par des invités (es), un titre chanté puis parlé par Alba, du symphonisme calme, bucolique et charmeur diront certains (8/10) avec un final trop abrupt (ce que je n'apprécie pas outre mesure) comme le savent celles et ceux qui me lisent. Le morceau le plus long de l'opus ensuite "Temptations" et ses dix minutes trente-quatre, avec deux voix Alba FERNANDEZ (pas sous son meilleur jour) soutenue par Manuel MAS, avec des cuivres (saxophone, trompette, trombone), relativement tortueux, malgré plusieurs écoutes attentives et même isolées du reste pas "my cup of tea" (6/10).

Place ensuite à l'excellent "A Bad Feeling" (9/10) l'une des meilleures pièces de l'album qui porte donc mal son nom, avec une introduction de cordes (violon, viola et surtout violoncelle) puis la six cordes de Jorge CAMARERO qui mène la danse avec le chant aigu et enfantin mais néanmoins puissant d'Alba, une plage pas si évidente que cela au demeurant."Toys" qui suit avec une sobre et fort agréable mise en bouche de Manuel MAS aux claviers et la belle basse ronde de Victor ARQUES, le chant d'Alba est semblable au titre précédent (un brin enfantin), un titre traversé et magnifié par la saxophone de Carlos Vicente MAS (9/10) dans le haut du panier de l'album."PRISTIQ-1" dans le format chanson parait bien fade en comparaison des deux morceaux précédents, de beaux chœurs détachés néanmoins et une six cordes véloce et technique, écoutable sans excès (6/10).

Clôture des soixante premières minutes avec "White Lies" (8/10) piano solennel et voix doucereuse pour débuter, beaucoup de claviers martelés en plus du piano, un peu trop chanté à mon gout même si bien chanté, les voix off à 3:32 alimentées par un percutant motif de guitare apporte un plus, nous allons aller voir de l'autre côté ce que propose NUMEN avec huit titres aussi mais des titres plus courts (6:54 étant le maximum).

Et c'est toute la difficulté de captiver sur la longueur avec un double album ! "Sophia" est une chanson lambda, rien de progressif là-dedans (5/10), "Two Natures In An Elevator" n'est guère plus passionnante (6/10), "He Said No" un peu au-dessus parce qu'il y a des cordes (7/10) , à cet instant je commence à m'inquiéter sérieusement de ce qui va suivre......bien que soient à venir les trois titres les plus longs. "Test the Wall" trop chanson encore une fois, c'est incontestablement le plus gros reproche que nous puissions faire à NUMEN et Alba FERNANDEZ qui chante trop et pas à son meilleur de surcroit (6/10). "How To Cut Your Throat While Shaving" la plage de la réconciliation (9/10) grâce une fois de plus à l'utilisation des cordes et des instruments à vent (basson, flute et hautbois), le tout avec une belle six cordes très lyrique, quel dommage qu'il n'y ait pas plus de titres de ce calibre...." The Abyss Of Non-Being" (8/10) suit juste la voix, la guitare acoustique puis électrique et des synthétiseurs volubiles, trop court !

"The Outsider's Funeral" avant dernier épisode de ce très long disque, porte bien son nom, sombre mais mélodique, des chœurs splendides, Alba FERNANDEZ à son meilleur niveau, le progressif symphonique comme nous l'apprécions (10/10). Je ne vais pas vous vendre la plage conclusive "Metamorphoseis" comme étant du même tonneau tout en restant du très bon NUMEN quand même, Alba y reprend sa voix mutine du premier disque, Victor ARQUES et Gaspar MARTINEZ effectuent un bon travail rythmique, les solistes sont tous les deux brillants, un des trop rares moments où Manuel MAS se lâche vraiment avec ses claviers (9/10).

NUMEN nous propose avec cet "Outsider" du très bon et même de l'excellent, mais qui côtoie le très moyen (pour rester poli) d'où la note globale qui pâtit de ce grand écart stylistique et musical, pas nécessaire de faire du long qui n'était pas utile (n'est-ce pas Monsieur Cadbury).