Le très prolifique Kevin KASTNING, guitariste et compositeur américain, mais aussi inventeur d'instruments à cordes, dont une fameuse guitare à 36 cordes à deux manches en « V », et bien d'autres dans le même genre pour explorer les possibilités artistiques de la physique ondulatoire, proposa en fin janvier dernier, une nouvelle œuvre tirée de ses archives oubliées d'enregistrement, datant de Septembre 2009, créée en collaboration avec un autre guitariste d'origine hongroise, Sandor SZABO, pour lequel il s'agit de la douzième collaboration avec celui-ci. KASTNING est reconnu comme un grand guitariste classique contemporain aimant s'entourer de musiciens d'exception afin de produire des œuvres très souvent improvisées, y incorporant des airs de jazz, de musiques traditionnelles et de nouvel âge.

Il y a onze ans, l'enregistrement de cet album fut réalisé en une seule journée, dans l'église du petit village de Nograd en Hongrie, au pied des ruines d'un vieux château du neuvième siècle. Une musique spéciale et minimaliste qui ne contient que de la guitare, et rien d'autre et qui plaira évidemment aux amateurs de guitare classique. Un minimalisme qui va jusqu'à l'identification des titres par des numéros de 1 à 14, et une publication qu'en mode digital seulement. Un type de musique éclectique qu'on n'entendra pas souvent sur les ondes des radios dites progressives, s’adressant vraiment à une clientèle particulière qui, j'imagine, ne doit pas être légion.

Ce qui frappe dès la première écoute, c'est la complémentarité et la complicité de ces deux artistes qui développent systématiquement des pièces assez articulées et bien organisées malgré leurs élans d'improvisation. Chaque pièce démontre sa propre atmosphère, y incorporant des passages nostalgiques, folkloriques ou dramatiques dans un tricot complexe de notes. On notera également des affiliations certaines sur de courts instants avec la guitare de HACKETT, rappelant du vieux GENESIS, sur la pièce « Nograd 3 », une de celle qui sort du lot, et qui est assez représentative de cet album. « Nograd 4 » et « 11 » se montrent quant à elles, plus rythmées et aventureuses et m'ont bien plu également, ainsi que la « 13 » qui laisse place à une légère présence de jazz intéressante. Le reste de l'album propose autant d'exercices expérimentaux qui sur le long terme pourraient déconcerter les oreilles peu formées à cette discipline de l'instantanée qui y entendront une suite de pièces redondantes, alors qu'elles sont définitivement bien différentes l'une de l'autre.

Cependant, les fans de Mark WINGFIELD et du genre jazz fusion classique vont s'y retrouver. Disons, que c'est un album qu'il faut absorber à petites doses pour bien apprécier. Il faut surtout avoir l'esprit disponible pour se concentrer car sinon il en restera une impression de décousu. On ne peut que saluer cet exercice d'improvisation et d'enregistrement en un temps record de ces musiciens, car cela relève de l'exploit. Que des cordes et des silences dans un enchevêtrement digne d'une broderie fine. Mais cela suffira-t 'il à attirer en grand nombre les oreilles curieuses ? En tout cas, ceci s’adresse à une niche particulière de mélomanes qui sauront en profiter. Bonne découverte à ceux qui y porteront attention !