Que pouvez-vous répondre à quelqu’un qui vous demande pourquoi acheter le nouvel album triple d’un artiste alors qu’il a déjà une discographie de plus de trois douzaines de disques compact en spectacle ? Aussi incroyable que semble ce nombre, il est tout à fait exact. Certes, ce nombre vient de coffrets, double, triple et même quadruple mais il demeure impressionnant. Si vous ajoutez les parutions studios de l’artiste en question, vous pouvez facilement doubler ce nombre. NEAL MORSE n’a plus besoin de présentation et, cette fois, le talentueux musicien est accompagné de ces quatre complices musicaux et ensemble ils forment le NEAL MORSE BAND.

Il y a deux ans, j’ai eu le plaisir de rédiger la chronique du plus récent et excellent album studio du groupe, soit « Innocence and Danger ». À la suite de l’enregistrement, le groupe a effectué sa première tournée postpandémique. Cette tournée passait par Montréal et Québec et j’avais des billets pour les deux endroits. Parce que j’avais vu les quatre tournées précédentes, mes attentes étaient au maximum. Parce que je connais la grande qualité du groupe en concert et à cause du cruel manque de musique en présentiel causé par la pandémie. Quiconque a eu la chance de voir NEAL MORSE en spectacle peut comprendre mon enthousiasme et a probablement alors succombé à son charisme et son talent si les albums n’avaient pas déjà eu cet effet. Au début 2022, le Québec connaît un soubresaut pandémique qui oblige l’annulation des concerts. Oh misère, oh malheur ! Alors voici donc une première réponse à la question initiale au pourquoi il faut se procurer ce « An Evening of Innocence and Danger: Live in Hamburg ».

Sur scène, la complicité et la complémentarité des cinq compères s’entend clairement et sur cet album nous pouvons vraiment la ressentir. Le groupe choisit toujours de présenter son nouveau matériel lorsqu’il effectue une tournée associée à la parution d’une œuvre. La tournée en question ne fait pas exception à la règle. Ainsi, le premier des trois albums, oui il s’agit bien d’un album triple ! Donc, la première galette offre six des huit morceaux du volet « Innocence » de l’album studio. On ajoute une très belle version de « Waterfall » tiré de « The Grand Experiment », premier opus officiel sous le nom du band. L’énergie déployée par les cinq musiciens modifie et ajoute suffisamment à chaque morceau pour susciter l’intérêt des amateurs du groupe. Je pense, entre autres, à « Do It All Again » et son introduction ou à l’enthousiasme manifesté par la foule pour « Bridge Over Troubled Water ». Souvenez-vous ce que YES a fait de « America » aussi créé par SIMON AND GARFUNKEL. Je sais que tous n’apprécient pas au même degré mais moi j’aime beaucoup.

Le deuxième disque est consacré au volet « Danger » de l’album studio, soit les deux pièces que sont « Not Afraid Pt.2 » et « Beyond the Years » pour près d’une heure de musique. J’avais écrit que ces deux morceaux en studio étaient suffisamment bons et puissants qu’ils auraient pu combler l’appétit musical des amateurs pour le disque précédent. Oh boy ! En spectacle, ils prennent une dimension supplémentaire, magique pourrait-on dire. On imagine facilement le charismatique et enthousiaste NEAL MORSE, la rythmique de feu du dynamique MIKE PORTNOY et du placide et implacable RANDY GEORGE. On voit le sourire et on entend le travail des dix doigts de BILL HUBAUER. Et n’oublions pas l’espace important qu’occupe ERIC GILLETTE par ses interventions vocales superbes mais surtout par son jeu de guitare qui, selon moi, n’est pas reconnu à sa juste valeur. Dans ma chronique, j’avais ajouté que j’avais des frissons en imaginant voir « Beyond the Years » en spectacle. Je confirme que l’écoute de cette version en spectacle peut provoquer lesdits frissons. MORSE assure le leadership mais l’interaction des musiciens est à couper le souffle. Les passages musicaux mettent en valeur la maestria des cinq musiciens et le chant, avec ses harmonies vocales, une grande qualité du groupe, et une section à la GENTLE GIANT ajoute une dimension qui nous fait découvrir la qualité de la composition. Intensité, beauté, virtuosité, finale grandiose sont quelques-uns des qualificatifs additionnels qui me viennent en tête pour cette pièce. Une chose est certaine, la performance offerte nous fait comprendre que ce morceau est un des meilleurs à avoir éclos de l’imaginaire musical si fertile de ce musicien.

Les deux tournées précédentes nous ont fait vivre de grandes émotions et de bien belles musiques grâce aux albums « The Similitude of a Dream » et « The Great Adventure ». Ceux-ci deviennent un condensé de trente minutes qui, à ce stade, est la cerise sur le sundae sous forme du troisième disque. Ce groupe est suffisamment talentueux pour réussir le tour de force de résumer deux albums double en trente minutes de façon cohérente, efficace et enthousiasmante. Le medley utilise, en tout ou en partie, « Long Day, City of Destruction, So Far Gone, The Ways of a Fool, Welcome to the World, The Great Adventure, A Love That Never Dies, Broken Sky/Long Day » pour former une nouvelle suite qui sert non seulement de rappel au spectacle mais aussi à ce que nous avons manqué. Les nombreux amateurs du groupe et les collectionneurs peuvent ainsi fournir une autre réponse à la question des débuts. La qualité de la prestation, « The Great Similitude Medley » et huit pièces en spectacle pleines d’énergie pour se rappeler ou pour compenser l’absence constituent un prétexte parfait pour son acquisition. Je confesse volontiers faire partie de ces amateurs.