Imaginez quelle fut ma surprise, lorsque l'on me proposa de chroniquer le groupe phare de la scène progressive québécoise, MYSTERY, à l'aube de la sortie de leur neuvième opus "Rédemption" du Saint Père fondateur, Michel de son prénom. Habitué depuis peu, à mes propres choix, voilà un nouvel imposé plus ou moins délicat puisque ledit groupe n'est pas représentatif de mon premier cercle d'écoute. Cela dit, je le conçois comme un exercice d'autant plus motivant. Déjà plus de deux décades se sont écoulées depuis leur premier album en 1996. On peut dire, d'ores et déjà qu'ils ne sont guère prolifiques. A priori, aucune modification du sextette depuis le précédent opus "Lie and butterflies’’.

A l'ouïe, des couleurs parcimonieuses entre ombre et lumière, les motifs harmoniques soignés. Un AOR stylisé, à l'image du morceau d'ouverture "Behind the Mirror’’. Des mélodies progressives mélancoliques, lumineuses, élégantes, éthérées, basculant de l'acoustique à l'électrique. Mais aussi la rencontre tout en émoi de la tessiture de JEAN PAGEAU. Son organe gorgé d'émotions que l'on perçoit dans "My Inspiration" frissonne dans l'échine. Puis, vous rencontrerez l'élégance des solos de la six cordes parfois plaintives, de Michel St PERE et Sylvain MOINEAU dans "Every Note", où les sons diffusés au gré des tonalités, laissent apparaître à l'esprit les figures atypiques de GILMOUR et ROTHERY. Et, derrière les fûts, Jean Sébastien GOYETTE, dirige à la baguette un rythme constant, répétitif, sous une atmosphère pesante et sombre qu'emprunte les claviers d'Antoine MICHAUD suivi comme son ombre, par la basse de François FOURNIER dans "rédemption". Voilà un petit avant-goût succinct de la qualité instrumentale dont s'illustre chaque intervenant sans excès, ni promptitude au vedettariat.

Après avoir énuméré la production et un bref tour d'horizon sur l'acuité intrinsèque de chaque intervenant ainsi que de l'osmose qui en résulte, j'aborde en seconde partie la qualité musicale ressentie. D'entrée, le ton est donné avec "Behind the Mirror". La couleur, le style Mystery de l'AOR se diffusent, les baguettes mènent la saccade, sur un refrain accrocheur. La voix du maestro s'illustre sur une orchestration flamboyante. Une guitare intrépide modélise la pièce. Les claviers bien tempérés, enrichissent les harmoniques déjà hauts en couleurs. L'équilibre de la résultante est d'une densité sonore savamment dosée. Plus calme et moins tumultueuse, fluctuante, mais pas moins riche en émotions, "Rédemption". Ce titre de l'album est l'un de mes morceaux préférés sur les huit que contient cet opus. C'est avant tout une ballade douce et mélancolique, soutenue par des arpèges à la guitare, enveloppés d'harmoniques soyeux, d'où émerge la voix émotive un tantinet théâtrale par moments de Jean PAGEAU. Si je peux me permettre ce petit aparté de ma pensée : "Rédemption" est l'antichambre ou les prémices des tribulations de l'aventure auditive. L'auteur y plante déjà les jalons du jardin sonore où fleurissent les émotions que sera "My inspiration".

"The Beauty and the least" excellentissime, la douceur de la voix se pose, sensible, entourée d'harmonieux accords, façon STEVE HACKETT. Une atmosphère progressive, la présence des lignes d'une basse efficace, jusqu'à en modifier les saccades des frappes sèches sur les fûts. Tout ceci est agrémenté parcimonieusement d'éphémères solos Guilmourien. Quant à "My Inspiration", pour moi, reste la plus émouvante de l'album. Une composition merveilleuse où chaque note respire la passion. Un voyage aux contrées du plaisir auditif parsemé d'éléments progressifs. "Every note" une mélodie rêveuse, marquée par des solos à l’envolé floydien teinté de MARILLION.

Puis, le style progressif prend une direction symphonique avec "Pearls and Fire". Le pouls est pris avec le jeu subtile du charleston. Durant près de 13 minutes, sous un rythme constant, un tempo nuancé, où l'auditeur sera imprégné d'éléments symphoniques mélodiques aux formes stylistiques rappelant SAGA. Un rock progressif aux nuances finement ciselées, une performance créative, toute en couleurs. "Homecoming" une immersion progressif symphonique dans les eaux tempérées du milieu des années 70 et 80. Puis, le cap est donné, la barre est prise de manière efficace sur tempo soutenu du duo basse batterie. Agrémenté, de-ci de-là, par des solos à la guitare virevoltante, s'ensuit "Is this how the Story Ends ?’’ Voilà comment se termine la fin de cette histoire. 19 minutes de grande créativité harmonique et mélodique. Dans une combinaison néo prog versus heavy.

En conclusion, après 74 minutes d'écoute, de réée…écoute, je remercie Gérald de m'avoir proposé d'écrire cette chronique. Sans quoi, je ne pourrais pas être en mesure de conseiller à tous les progueux et non-progueux cet album. Donc, huit titres plus tard, MYSTERY convainc dans l'art des compositions longues et séduisantes. Charmée également par les trois compositions que sont : "Rédemption" - "My Inspiration" "Every note’’; chef d’œuvre émotionnel. Je n'oublie pas cette fois-ci de faire un petit clin d'œil également à l'artiste pour sa remarquable création du visuel énigmatique, enclin à la réflexion.