Je profite régulièrement de l’écriture de ces chroniques pour découvrir des formations progressives, et celle-ci n’est pas banale, moi qui suis amateur de chanteuses aux voix exceptionnelles. Menée par la chanteuse Amy BIRKS, qui avait remporté le prix de la meilleure chanteuse aux Prog Awards en 2018, la nouvelle incarnation de BEATRIX PLAYERS apparaît après une longue pause de cinq années pour délivrer ce deuxième album. Initialement un trio, elle s’est métamorphosée en un octet qui aligne une belle panoplie d’instruments nobles, et des collaborateurs expérimentés, dont John HACKETT (le frère de l’autre) avec sa flûte, le batteur de Tim BOWNESS et le guitariste de THAT JOE PAYNE.

Avec une instrumentation et des interprètes de qualité, la musique de BEATRIX PLAYERS s’aventure dans un mélange de style alliant le folk rock, l'acoustique, le Prog à faible dose et la pop de chambre baroque quasi classique. Pour vous donner un aperçu de à quoi cela pourrait ressembler, et bien, mélanger savamment des doses de Loreena McKENNIT, de Sarah McLACHLAN, de Kate BUSH, de Tori AMOS et de BIG BIG TRAIN, et vous devriez vous y retrouver.

Sur des textes se voulant une réflexion sur le postulat qu’il faut apprendre à vivre sa vie pour en profiter au maximum et qu’il ne faut pas se contenter d’être seulement vivant, nous sont livrées dix chansons serties de notes délicieuses et « classy » qui servent d’écrin pour porter aux nues la voix de Mme BIRKS dont la prononciation est impeccable ce qui permet d’apprécier à sa juste valeur les textes. Ne vous attendez pas à un assemblage de morceaux épiques qui brassent de l’air. C’est plutôt le contraire, et peut être que cela fera fuir quelques auditeurs en quête d’émotions fortes.

On est avec cette œuvre dans la délicatesse, la mélancolie, l’intimité, la douceur, la réserve et la mesure, avec des rythmes lents, des développements minutieux, où les courts silences ont autant d’importance que les notes claires et distinctes, bien qu’il y ait aussi des poussées plus dynamiques et intenses. Une musique typiquement anglaise, épurée, vaporeuse et sobre, qui vient chercher cet aspect folklorique ou plutôt ce petit bout d’âme ancienne qui caractérise la campagne anglaise du temps de sa grandeur victorienne, comme ont su le faire précédemment GENESIS, BIG BIG TRAIN et KAPREKAR’S CONSTANT.

Pouvant être rébarbatif pour ceux qui cherche l’action et les hauts frissons associés à une technicité démonstrative, car ici, on se plaît plutôt dans une mouvance de lenteur et de création d’émotions, cet album pourtant aligne, pour qui saura prendre le temps de vraiment écouter, un bon lot de perles qui méritent une lecture en boucles. Ayant voulu identifier la chanson qui me plut le plus lors de mes écoutes analytiques, je me suis ramassé avec dix chansons arborant leurs lots d’étoiles. Pas simple quand le niveau de qualité est si haut, mais le dernier morceau, « Me I Am Me », est probablement le point culminant de cet album, avec un son épuré, aéré, où on le laisse le temps au note de prendre l’espace auxquels elles ont droit pour donner l’impact émotionnel requis. Mais je peux vous recommander aisément « Start Again », « A Beautiful Lie » « Free », toutes riches en éléments classiques, « Purgatory » et sa colère si bien exprimée, et aussi « You can’t Hit a Nail » où la flûte de HACKETT contribue avec le piano et la guitare à donner à cette chanson un aspect très MOODY BLUES des premières années.

Cela est beau, cela est doux, et je crois qu’il faut vraiment être dans de bonnes dispositions pour accepter ce cadeau sonore, car il se savoure lentement. Lentement. Lentement. Pour les fans de vinyle et de CD, prenez note qu’ils peuvent être précommandés auprès de « Burning Shed ». Pour les vinyles, l’édition est limitée à seulement 500 exemplaires pressés sur vinyle coloré. Bonne écoute !